L’aventure selon Halvard
Bonjour,
Débuts difficiles sur ce Rhum 2014. Il semblerait, vu de loin, que chacun a son lot de soucis divers.
A bord de Campagne 2 France, ça navigue encore. Un peu au ralenti, comme vous devez vous en apercevoir, mais il se trouve que, entre autres, j’ai des soucis de direction, comme dirait mon garagiste. Dès la première nuit mon système de barre s’est mis en vrac suite à la rupture de la barre de liaison qui assure l’interconnectivité des 2 safrans.
Quelques vracs monumentaux s’en sont suivis, avec à chaque fois arrêts sur le bord de la route, bricolage, et re-départ. Dans mes malheurs, la seule chance que j’ai, c’est que je peux naviguer en tribord amure car le pilote est connecté sur le safran babord, celui qui travaille, car c’est celui sous le vent. J’ai essayé de bricoler avec des bouts de ficelle pour l’instant, car pour réparer correctement il me faudrait des tas d’outils que j’ai au chantier, mais qui n’ont normalement rien à faire sur un bateau qui est préparé correctement.
Mais surtout, tant que la mer ne s’est pas calmée, il est impossible d’entreprendre quoi que ce soit. C’est intenable et limite dangereux de se lancer dans de la bricole dans un endroit qui en plus d’être inaccessible est aussi le plus secoué du bateau car situé à l’extrémité arrière.
En plus il se trouve que j’ai quelques soucis de pilote, un malheur n’arrivant jamais seul, et il est assez désagréable de sentir le bateau partir au tas quand on est coincé dans le coqueron arrière et donc sans la possibilité immédiate de bondir sur le pont pour tenter de limiter les dégâts.
Bref, pour l’instant la course est un peu loin. Le défi change de tournure. Il s’agit d’essayer d’aller de l’autre côté par ses propres moyens et en autonomie. C’est bien le principe de base d’une Transat en solitaire, non? Même si la “régate” aurait tendance à faire oublier l’Aventure, les diverses avaries constatées dès les premières heures de course remettent un peu les pendules à l’heure.
La multiplicité des courses transatlantique et la façon de les raconter, en se cantonnant hélas trop souvent à uniquement décrire ce qui se passe tactiquement sur le “plan d’eau”, auraient pu nous faire croire que traverser l’Atlantique en 2014 est d’une banalité désarmante. He bien non, ce n’est pas si facile que ça!
En attendant il va bien falloir que je trouve les moyens de solutionner mes petits problèmes divers si je veux arriver de l’autre côté de la marre.
Pas trop le temps de m’ennuyer pour l’instant, et de quoi méditer la célèbre maxime de Michel Audiard “si on bricolait plus souvent, on n’aurait moins la tête aux bêtises”. …
Boum. Au moment où j’écris ces lignes, un grand choc, le bateau part en vrac, je bondis sur le pont… Le safran babord est bloqué! le seul safran qui marche avec le pilote. Impossible de le bouger. A force j’arrive à l’anguler et une grande gerbe s’échappe derrière. Suis-je en train de perdre la pelle suite à une collision? Le jour se lève à peine. Je me penche pour regarder sous la coque. Il y a un énorme poisson qui s’est pris le safran en plein milieu du dos et qui est plié autour du safran. Forcément, dans ces conditions ça marche beaucoup moins bien… Donc je roule les voiles d’avant, je fais une marche arrière et le requin, ou genre requin, environ 1.80 mètre, arrive à se dégager quand je recule. J’ai l’impression qu’il est bon pour aller voir son ethiopathe celui-là. Bon on repart, pas encore en mode course car il y du boulot avant, mais en tous cas on fait du sud. C’est mieux que du Nord Est pour aller en Guadeloupe….
A bientôt
Campagne 2 France